La nouvelle édition à avoir dans sa bibliothèque !
Marvels, la mini-série sublime et primée de Kurt Busiek et Alex Ross, sort ce mois-ci dans une nouvelle édition de luxe et annotée ! Une vraie pièce de collection !
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La cloche a sonné. C’est la rentrée et Culture Flashback is back in black avec, dans sa petite besace, une oeuvre cultissime qui a fait les belles heures de la culture nineties. Une petite douceur qui sent le soufre, le sapin, la bonne odeur de la muerte au petit matin. Faites place au corbac !
“I have something to give you. I don’t want it anymore. Thirty hours of pain all at once, all for you.” Eric Draven
Que ce soit dans sa forme papier ou cinématographique, The Crow est une œuvre à part, au destin très particulier. Créée par le perturbé James O’Barr en 1989, le personnage d’Eric Draven émerge dans le cerveau de son auteur suite au décès de sa petite amie, brutalement renversée par un chauffard quelques années plus tôt. Cette histoire d’une noirceur et d’une violence inouïe sera pour O’Barr une sorte d’exutoire, comme il le confessera à la sortie du comic book :« ce personnage est capable de revenir d’entre les morts parce que certaines choses ne peuvent tout simplement pas être pardonnées. » Amen.
The Crow nous présente l’histoire d’Eric Draven, une star du rock alternatif brutalement assassiné avec sa fiancée (of course) lors de la « nuit du démon », moment choisi par le parrain du crime Top Dollar pour commettre des actes violences et toutes sortes d’exactions avec ses sbires. Un an plus tard, un corbeau ramène Draven à la vie pour lui permettre de prendre sa revanche sur ses meurtriers…
Claque esthétique et narrative, en tout point raccord avec les canons du dark age of comics, The Crow est un succès en librairie qui engendre assez rapidement la mise en chantier d’une adaptation cinématographique. C’est Alex Proyas, un réalisateur australien issu de la génération des clippeurs 90’s ( David Fincher, Spike Jonze, Michel Gondry etc) qui se rue sur le projet, se sentant des affinités avec cet univers noir et mélancolique au style visuel rock et gothique.
Le premier coup de manivelle est donné durant l’hiver 1993 et la fin du tournage, quelques mois plus tard, va connaitre une tragédie qui va instantanément envoyer le film dans une autre dimension. Choisi par Proyas pour incarner Draven, l’acteur Brandon Lee meurt accidentellement d’une balle restée coincée dans le barillet d’un pistolet utilisé par Michael Massee (Funboy) lors d’une scène d’exécution.
L’annonce de la mort du fils de Bruce Lee, lui aussi décédé jeune et en pleine gloire, fait l’effet d’une bombe à Hollywood et pare The Crow d’une aura aussi mystique que mortifère. Imaginez : un film sur la mort, dicté par la mort et dont le tournage s’achève par une mort, ce se pose là niveau background artistique. Mais au-delà de ce déluge de noirceur qui plaça le cultomètre de l’œuvre au niveau maxi avant même sa sortie en salle, qu’est-ce que ça vaut en définitive The Crow ?
Baigné dans une atmosphère gothique ultra stylisée et une pluie bladerunneresque , le film à pour qualité principale de ne jamais renier son matériau d’origine. Contrairement à la saga Superman ou au dyptique Batman de Tim Burton, absolument tout dans The Crow est construit pour respecter et magnifier la vision de O’Barr sur la version papier.
Les dialogues conservent la nature ampoulée et grandiloquente qui faisait le sel du comics (le mémorable « maman est le premier nom de Dieu dans la bouche de tous les enfants du monde ») et inclus même des citations de grands auteurs littéraires de-la-mort-qui-tue comme Edgar Allan Poe ou John Milton. En somme, il ne manque que les bulles pour différencier les personnages du film à ceux du comics. Pas en reste, les ennemis se présentent comme de vraies ordures ordinaires à cent lieues des super-vilains comme Lex Luthor ou le Joker, ce qui, pour l’époque, était plutôt original. Et il y a bien sur le personnage de Draven.
A la fois continuation et évolution de l’archétype cinématographique de l’esprit vengeur, Eric Draven se pare d’une dimension de vigilante héritée de classiques des 70’s (High Plain Drifter, Death Wish), cocktail détonnant et totalement inédit. Une icône gothique instantanée en somme, renforcée par l’interprétation à fleur de peau de Lee et bien sûr, par sa disparition soudaine qui aura pour effet de pourrir les fêtes d’Halloween de toute une génération avec son combo cheveux gras/maquillage blafard/redingote en cuir.
Les personnages secondaires ne sont pas en reste, et apportent, tous à leur manière, une contribution intéressante. La jeune Sarah, narratrice de l’histoire, fait figure de contrepoint émotionnel avec son point de vue nimbé d’innocence et Ernie Hudson (inoubliable Winston de Ghostbusters) est assez épatant en flic au grand cœur.
Coté mise en scène, le métrage est de bonne facture même si l’on sent que Proyas débutait dans le métier. Axé à 100% sur le côté viscéral et stylisé, le film oublie peut être de distiller quelques niveaux de lecture qui aurait pu lui permettre de s’élever plus haut et de se démarquer un peu plus du flot des blockbusters 90’s. Le montage oscille entre flashbacks épurés et scènes d’actions nerveuses habillées par une soundtrack power rock à bombe de balle, ce qui rend le tout efficace mais un poil répétitif.
En plus d’annoncer la vague emo des années 2000 (les sagas Matrix et Underworld en tête), ce coup d’essai de Proyas démontra au tout Hollywood qu’il en avait assez sous la semelle pour pouvoir aller titiller les McTiernan et autres Cameron à l’avenir.
Ce qu’il ne fit jamais. Chienne de vie.
THE CROW, de Alex Proyas (1999). Avec Brandon Lee, Rochelle Davis, Ernie Hudson, Michael Wincott.
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