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Bienvenue dans ce dernier numéro de l’année de Comics Out ! Aujourd’hui, nous vous parlons d’un comics qui vaut le détour même si celui-ci est assez méconnu du grand public. Pourtant, il est relativement récent et est créé par l’un des grands auteurs de notre époque. Nous parlons aujourd’hui de Memetic, mais de quoi s’agit-il ?
Qu’est-ce que Memetic ?
Memetic est une mini-série de comics en 3 numéros qui fut publiée sur base mensuelle en 2014 chez BOOM! Studios. Un an après sa publication, en 2015, l’éditeur a ensuite réédité la série en un seul tome broché. Memetic n’a par contre encore jamais été traduit en version française.
Le comics, qui fêtera ses 10 ans l’année prochaine, est l’un des premiers comics indépendants de James Tynion IV. Si ce nom vous dit quelque chose, c’est normal, car Tynion est tout simplement le tenant du titre de l’Eisner Award du meilleur auteur, qu’il a gagné pour la troisième année consécutive en juillet 2023. En 2014, Tynion n’en était cependant qu’à ses débuts. L’auteur avait en effet débuté deux ans plus tôt, à l’âge de 24 ans, chez DC Comics, où il avait pour mentor un certain Scott Snyder, auteur en pleine explosion à l’époque. Tynion co-écrira avec Snyder les histoires secondaires du titre Batman, puis d’autres titres de la Batman Family tels que Talon et Batman Eternal avant de se voir attribuer l’iconique Detective Comics lors du DC Rebirth en 2016. Il écrira la série jusqu’en 2020 avant de passer en tant qu’auteur principal sur Batman jusqu’en 2021, année où il arrêtera d’écrire pour DC afin de se concentrer sur ses oeuvres indépendantes.
Memetic fut donc l’une des ses premières oeuvres indépendantes en 2014, même s’il s’agit aujourd’hui d’une des moins connues. James Tynion IV a par la suite été récompensé pour bon nombre de ses eeuvres indépendantes, parmi lesquelles ont peut citer Wynd, The Woods et Something Is Killing the Children chez BOOM! Studios, The Nice House on the Lake sous le DC Black Label de DC, ou encore The Department of Truth chez Image Comics.
Au dessin, Memetic est aussi créé par Eryk Donovan. L’artiste n’a pas eu la même trajectoire que Tynion mais celui-ci a encore collaboré avec l’auteur à plusieurs reprises, créant deux autres séries d’horreur chez BOOM! Studios dans la même lignée que Memetic, Cognetic et Eugenic, avant de collaborer sur John Constantine: Hellblazer chez DC.
Memetic est donc une histoire d’horreur apocalyptique mais elle compte un aspect LGBTQ+ important, d’où sa présence dans Comics Out aujourd’hui. Memetic fut nominé en 2015 pour le GLAAD Media Award du meilleur comics, une catégorie dans laquelle James Tynion IV est tout simplement l’auteur le plus nominé de l’histoire. Mais que raconte Memetic au juste ?
Memetic, un couple gay en pleine apocalypse
Memetic compte un aspect LGBTQ+ important mais il ne s’agit pas de l’histoire principale. Le comics est avant tout une histoire d’apocalypse qui s’inspire de la théorie des memes de Richard Dawkins. Le lecteur se retrouve plongé dans un monde identique au nôtre dans lequel une image d’un paresseux au pouce levé devient virale. Cette image anodine devient un véritable meme, au point que tout le monde en parle et que les média s’approprient l’histoire car cette image a un effet particulier sur les gens.
Lorsque les gens regardent ce paresseux, ils se retrouvent emplis d’un sentiment de paix et de plénitude inexplicable. Tout le monde veut essayer cette nouvelle expérience et la situation dégringole en l’espace de quelques jours à peine. Les habitants de la terre toute entière sont affectés par ce meme et quiconque l’a vu commence à ne plus répondre de ses actes et à crier sans raison. Les gens se déshabillent et descendent dans les rues en criant, voyant leur cri déclencher une deuxième vague de contamination. Ce meme s’avère avoir été généré exactement dans ce but, afin de déclencher une réaction en chaine qui se termine par la fusion inéluctable de tous les individus pour accueillir une invasion alien. .a fin n’est pas très joyeuse, mais au milieu de cette apocalypse on retrouve un couple d’homosexuels en guise de protagonistes principaux.
D’un côté, Aaron est un garçon introverti et peu sûr de lui, qui se retrouve séparé de son petit ami au début de l’apocalypse. Celui-ci, Ryan, apparait comme ayant beaucoup plus de confiance en lui et la seule personne à pouvoir rassurer Aaron. Le couple est éperdument amoureux l’un de l’autre et le lecteur suit Aaron dans un premier temps, qui se retrouve dans un état de panique et d’inquiétude en l’absence de nouvelles de Ryan.
Le couple finira par se retrouver et, face à la disparition des parents de Ryan, s’isolera dans un appartement abandonné. Vu l’insistance d’Aaron, Ryan a fait son possible pour ne pas regarder le même tandis qu’Aaron l’avait vu mais n’en subissait pas les effets à cause de son daltonisme. Le couple, juste après avoir profité d’un moment de retrouvailles au lit, se met à entendre les cris dans la rue, qui commencent à enivrer Ryan. Aaron, qui a également une déficience auditive, n’est pas non plus affecté, mais voit son petit ami se jeter nu du balcon avec effroi. Aaron se retrouve seul, sans l’être qu’il aime le plus au monde, et veut aussi connaitre cette sensation de bien-être que tout le monde connait. Il sort alors en rue et commence à subir les mêmes effets en étant en contact avec les autres personnes contaminées. Aaron termine sa vie dans la masse humaine comme le reste de la population.
En quoi Memetic est une bonne représentation de la communauté LGBTQ+ ?
Memetic – vous l’aurez compris entre les lignes – n’est pas une happy end. Toutefois, à travers cette situation apocalyptique, l’image de la relation homosexuelle qui en est dépeinte envoie un message très positif. Les personnages ont été construits par James Tynion IV pour qu’ils reflètent l’opposé de la situation et le lecteur se retrouve plongé dans leur bulle d’optimisme malgré une situation mondiale alarmante.
Au-delà qu’il s’agit d’une relation homosexuelle, chacun peut se retrouver en Aaron et Ryan : la peur de ne jamais revoir l’être aimé dans une situation catastrophique comme celle-ci ; s’imaginer le pire scénario en l’absence de nouvelles car on ne pourrait vivre sans cette personne ; se retrouver et voir que rien d’autre n’a d’importance autour de nous, autour de cette bulle créée ensemble ; avoir la chance de pouvoir passer ses derniers moments en compagnie de l’être aimé.
Memetic est ainsi le genre d’histoire qui peut parler à n’importe quel type de relation et c’est sans doute ceci qui en fait une bonne représentation de la communauté LGBTQ+. En dépeignant ainsi Aaron et Ryan, James Tynion IV démontre qu’un couple homosexuel fonctionne de la même manière qu’un couple hétérosexuel, et qu’au final, l’amour n’a pas de sexe quand deux êtres s’aiment.
Memetic est une histoire très personnelle pour James Tynion IV, qui décrit Aaron comme quelqu’un de similaire à la manière dont il était à l’université. Il était ainsi important pour lui que le personnage d’Aaron soit, tout comme lui, homosexuel. Memetic est au final une oeuvre dans laquelle Tynion a mis énormément de lui mais dans laquelle chacun peut s’y retrouver.
Memetic illustre parfaitement l’ascenseur émotionnel de la relation amoureuse, les hauts et les bas d’une vie, le tout en version accélérée, vu que l’histoire ne dure que trois jours. Il s’agit aussi, enfin, d’un bel exemple qu’il ne faut parfois pas énormément de pages pour dépeindre la profondeur d’un personnage et/ou d’une relation, qu’importe sa complexité. Memetic est une histoire courte mais pleine de sensibilité dans un monde en pleine destruction, démontrant qu’au final, seul l’amour prime.
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